1910
Naissance de Dominique Pire à Leffe, près de Dinant. À 18 ans, il rejoint l’ordre dominicain en entrant au couvent de la Sarte à Huy. Ordonné prêtre à Rome en 1934, il y poursuit un doctorat en théologie.
1949
Dominique Pire découvre la détresse des personnes déplacées (DP) de l’Est de l’Europe, échouées dans des camps sur le sol de l’ancien Reich. En particulier, celle du « hard core » (résidu) : près de 50 000 vieillards, malades, infirmes ou femmes et enfants sans soutien. Il décide alors d’agir et, entouré d’amis et de bénévoles, il lance une grande opération de parrainage : échanges de courriers, envois de colis. L’objectif est de rendre espoir à ces laissés-pour-compte, de créer des liens. L’Aide aux Personnes Déplacées était née. Entre 1949 et 1962, 18 000 réfugiés seront parrainés grâce à l’organisation, mais la formule a ses limites : il faut sortir ces gens des camps.
1950
Un premier home pour réfugiés âgés est ouvert à Huy, suivi de trois autres à Esneux, Aartselaar et Braine-le-Comte. Ce sera ensuite la création de sept villages européens destinés à l’accueil de familles. Le fil conducteur de ces actions, c’est avant tout un état d’esprit, un leitmotiv qui guidera Dominique Pire jusqu’à sa mort. À l’aube de la construction européenne, il plaide pour une Europe du cœur qui ne serait pas seulement économique ou politique mais humaine et fraternelle, au-delà des clivages idéologiques, culturels ou religieux. Il lance en Belgique et dans toute l’Europe une vaste campagne dont le but n’est pas simplement de récolter des fonds – l’association ne bénéficie alors d’aucun subside public – mais de susciter partout des initiatives locales solidaires.
1958
Dominique Pire reçoit le prix Nobel de la paix pour son action en faveur des réfugiés et, surtout, pour l’esprit qui anime cette action. Cette reconnaissance lui confère une renommée internationale qu’il entend mettre au service de la paix et de la fraternité dans le monde entier : l’Europe du cœur fait place au « monde du cœur » qui se traduira par la création de nouveaux projets : les Parrainages Mondiaux, les Îles de Paix, l’Université de Paix. Projets qui prendront ensuite leur autonomie pour devenir des associations indépendantes.
1969
Décès de Dominique Pire. En Belgique, l’Aide aux Personnes Déplacées continue sa mission initiale d’accueil et d’aide aux réfugiés.
1970
Dans les années 1970, l’association vient en aide aux opposants de nombreuses dictatures latino-américaines ainsi qu’aux réfugiés du Sud-Est asiatique.
1980
Au début des années 1980, l’association structure des groupes d’accueil, les informe et leur confie des familles de réfugiés. Elle sensibilise le public qu’elle mobilise pour trouver des logements, encadrer la scolarité des enfants. Elle assure un suivi social, toujours grâce à l’implication de bénévoles et au soutien de donateurs. Une partie du home de Braine-le-Comte est transformée en maison de transit pour ces nouveaux réfugiés, la seule en Belgique.
1985
L’Aide aux Personnes Déplacées est enfin reconnue par les pouvoirs publics et reçoit un financement qui permet de salarier trois assistantes sociales à temps plein. Une reconnaissance bienvenue après 36 ans d’actions sur le terrain.
Aujourd’hui
L’asbl compte sept assistantes sociales, quatre formateurs et quatre éducateurs, toujours entourés d’un réseau de bénévoles et de donateurs. À Liège et Namur, un service social spécialisé en droit des étrangers traite chaque année plus de 1 300 dossiers : procédures de demande d’asile, de regroupement familial, de visa humanitaire… Il accompagne également les usagers dans leurs démarches de la vie quotidienne. À Liège, des formations en français langue étrangère (FLE) et en citoyenneté sont organisées pour différents niveaux. Près de 170 apprenants sont ainsi formés chaque année. À Braine-le-Comte, la maison d’accueil Dominique Pire héberge et accompagne vers l’autonomie des mineurs étrangers non accompagnés (MENA) dans ses trois implantations. Parallèlement à sa mission de base, l’association met en place des projets ponctuels, soit au bénéfice de ses usagers, soit dans une optique de sensibilisation du public.
Demain
Tout le monde parle de ce qu’il est convenu d’appeler, sans doute abusivement, la « crise migratoire ». Peur et rejet pour certains, élan de solidarité pour d’autres, le débat enflamme l’opinion, s’invite dans tous les agendas politiques et fait tanguer la très fragile cohésion européenne. Doit-on ouvrir davantage les frontières ou, au contraire, repousser ces hommes, ces femmes, ces enfants qui fuient les guerres, les dictatures, les pratiques traditionnelles violentes ou l’absence de perspectives ? La question est complexe et les réponses à y apporter le sont tout autant. Mais au-delà des joutes idéologiques, il appartient à notre association d’écouter ceux dont on parle tant mais que l’on entend si peu et de tout mettre en œuvre pour les informer, les guider et les aider à faire reconnaitre leurs droits. En 1949, Dominique Pire rêvait d’un monde solidaire, fraternel où chacun trouverait sa place, dans le respect et la dignité. Plus de 70 ans plus tard, dans un contexte de repli et de montée du populisme, nous sommes encore loin du compte et l’action de l’Aide aux Personnes Déplacées est plus que jamais nécessaire.