À propos

Témoignages

Darius – Iran

J’ai quitté un pays qui ne correspond en rien à mes idéaux. Un pays qui, pendant des siècles, s’est distingué par le raffinement de sa culture et qui, aujourd’hui, lapide les femmes adultères et pend les condamnés dans les parcs publics. Ici, cependant, on ne veut pas de moi car je ne peux attester d’une crainte « personnelle » de persécution. En attendant des jours meilleurs, je vivote en redoutant que les pas de la police ne croisent les miens.

Natacha – Géorgie

J’avais 60 ans quand je suis arrivée en Belgique. Mon mari, qui avait demandé l’asile politique deux ans plus tôt, venait de tomber gravement malade et avait besoin de moi. N’ayant aucune raison de demander l’asile moi-même, je croyais n’avoir aucun droit et je vivais dans l’angoisse. Je marchais en rasant les murs. À court d’argent, j’ai fait des ménages. Certaines personnes ont profité de ma situation et ne m’ont pas payée. Ma vie a changé quand j’ai rencontré les assistantes sociales de l’APD. J’ai pris conscience que je n’étais pas à la merci de tous et j’ai été aidée pour de multiples démarches, tant pour obtenir un droit de séjour que pour faire face à tous les problèmes qui se posaient à nous (logement social, mutuelle puis, plus tard, pension). Ce qui m’a frappée, c’était leur sens de l’accueil. En dépit du nombre de personnes qui défilent chaque matin dans leur bureau, elles portent une véritable attention à chaque personne. Je me suis sentie soutenue et, peu à peu, j’ai pu entreprendre moi-même une série de démarches.

Djenba – Guinée

De là où je viens, les papiers n’ont pas beaucoup d’importance. Ici, mal remplir un formulaire peut gâcher ta vie. Ma copine a perdu la chance de se faire rejoindre par son mari parce qu’elle était mal conseillée. J’ai de la chance d’avoir rencontré les assistantes sociales de l’APD. Dans beaucoup de services, on te dit ce que tu dois faire mais on ne t’aide pas à le faire. La vie en Belgique est trop stressante pour les gens comme moi. Les assistantes sociales de l’APD comprennent ça et elles t’aident. Parfois elles font les choses pour toi et, quand elles comprennent que tu peux le faire, elles t’expliquent comment faire, elles te donnent confiance.

Trésor – RD Congo

Mon père était propriétaire de multiples champs cultivables dont le chef coutumier de mon village voulait s’emparer pour les revendre à une société chinoise. Mon père a refusé et il s’est fait tuer. Le chef coutumier a ensuite envoyé ses hommes pour me tuer, moi aussi. J’ai fui à temps vers l’Ouganda mais là non plus, nous n’étions pas en sécurité. J’ai pris la décision de mettre ma famille à l’abri chez un pasteur et j’ai fui jusqu’en Belgique. J’ai réussi à obtenir le statut de réfugié et j’ai décroché un emploi en tant qu’article 60. À présent, j’attends de pouvoir faire venir ma famille.

Moi, ici j’avais l’impression d’être transparent. Bien-sûr, j’avais rencontré des Belges, mais c’était toujours des gens qui faisaient leur travail. Ils me disaient ce que je devais faire, ce que je ne devais pas faire… mais j’avais l’impression qu’ils m’informaient comme un ordinateur aurait pu le faire. J’étais toujours tendu. À l’Aide aux Personnes Déplacées, j’ai eu l’impression de réussir à accrocher le regard de quelqu’un. Les assistantes sociales savent beaucoup de choses et on sent qu’elles aiment aider. Les rencontrer m’a permis de me décontracter et la vie à la maison est devenue beaucoup plus facile.

Yaye – Mali

À la mort de mon mari, comme le veut la tradition, j’ai été remariée à son frère ainé qui avait déjà deux femmes. Ma vie et celle de mes enfants est devenue un enfer. Je ne pouvais sortir de la parcelle que pour aller au marché accompagnée de mes co-épouses et chacun de mes gestes était rapporté à mon mari. Pour me punir, il me privait d’un médicament pourtant vital pour moi. Un jour, je me suis sauvée mais il m’a retrouvée. Il a porté plainte contre la personne qui m’avait secourue et, pour me faire souffrir, a donné ma fille de 14 ans en mariage à un de ses amis. Chez moi, tu dois tout endurer. Tu n’as aucun droit.

Mohamed – Syrie

J’ai fait partie de ce que l’on appelle, ce que l’on appelait, l’opposition démocratique en Syrie. J’ai connu les geôles de Bachar al-Assad jusqu’à ce que ma famille puisse payer quelqu’un pour me faire sortir. J’ai dû fuir en laissant ma famille dans une ville sur laquelle des pluies de bombes se sont par la suite abattues. Je ne vivais plus. Quand j’ai été reconnu réfugié, ma femme a pu obtenir un visa de regroupement familial en quelques mois mais pas mes filles, qui avaient plus de 18 ans. Avec l’appui de l’APD, nous avons pu convaincre la Belgique de leur donner un visa humanitaire. L’attente a été longue mais aujourd’hui, notre famille est enfin réunie.

Hasan, 25 ans – Syrie

En Syrie, j’étudiais l’économie à l’université. J’étais un bon étudiant, mais je redoutais de voir le moment de l’obtention de mon diplôme arriver… Tant que j’étais en cours de master, j’étais dispensé de l’obligation militaire et donc de l’enrôlement dans les troupes de Bachar al-Assad, dont je ne partageais en rien les idées politiques. En dernière année, j’ai même volontairement raté certains examens pour gagner un peu de temps et pour pouvoir organiser mon départ… Après mon arrivée en Belgique, j’ai appris le français à l’APD pendant un an et comme je ne pouvais pas obtenir d’équivalence de diplôme, j’ai repris un bachelier en comptabilité dans une Haute École à Liège. Ce n’est pas facile de poursuivre des études dans une langue qui n’est pas ta langue maternelle. Cela m’a demandé énormément de travail, mais je vais entrer en deuxième année et j’en suis très heureux.

Zahra, 33 ans – Somalie

Quand j’étais petite, je ne pouvais pas aller à l’école, je devais rester à la maison pour aider ma maman. Mes frères et sœurs allaient à l’école coranique, mais moi pas. À 26 ans, j’ai quitté mon pays parce que c’était trop dangereux de rester, il y avait beaucoup de violence. Je suis d’abord allée au Kenya. Je suis restée là pendant deux ans. Puis, je suis partie en Belgique en 2013. J’ai d’abord appris un peu le français dans la bibliothèque de mon quartier, puis j’ai commencé des vrais cours à l’APD avec Yves. C’était magnifique !

Depuis que je parle français, je peux discuter avec l’institutrice de mon fils Ismaïl. Je vais seule chez le docteur, au magasin, au CPAS, à la banque… Le soir, on discute un peu en français avec mon fils. Pour lire aussi, c’est bien : j’aide mon fils pour ses devoirs, j’aide des amies qui ne savent pas lire. La semaine passée, j’ai vu une erreur sur ma souche du magasin : je suis retournée au magasin et on m’a rendu l’argent. Avant, j’aurais payé trop ! Et puis, je peux lire les horaires des bus, et à la gare aussi. Je ne me perds plus en ville : je sais lire le nom des rues. La vie a changé pour moi, je ne suis plus obligée de rester chez moi toute la journée, je sors. Pour écrire, c’est encore difficile, mais je vais continuer à aller à l’école.

Shirin et Ahmad, 32 et 34 ans – Syrie

Mon mari et moi, nous nous sommes rencontrés à l’université. Nous sommes Kurdes et nous avons toujours été habitués à une certaine discrimination. Ce n’était pas agréable mais ce n’était pas toujours négatif. Comme étudiants, par exemple, cela nous poussait à être les meilleurs pour pouvoir réussir ; cela nous donnait de la force de caractère aussi, mais avec le conflit en Syrie, la situation de notre communauté est devenue intenable, nous avions deux enfants en bas âge et nous devions les mettre en sécurité. Le frère de mon mari et sa famille étaient déjà établis en Belgique, il avait étudié le français à l’APD et ouvert un commerce. Nous avons décidé de le rejoindre. Nous aussi, nous avons appris le français à l’APD. Aujourd’hui, mon mari travaille avec son frère, mais il pense reprendre des cours du soir pour pouvoir enseigner l’anglais. Nos enfants vont à l’école, ils ont des amis. Peu à peu, ils oublient la peur…

Ali, 35 ans – Soudan

Dans mon village au Soudan, il n’y avait pas d’école. La plus proche était à 30 km de chez moi. En plus, je devais travailler : garder les troupeaux de moutons et de vaches, m’occuper de nos plantations. Donc, je ne suis jamais allé à l’école, comme aucun de mes frères et sœurs… J’ai quitté mon pays en 2014, j’avais 31 ans. Je suis arrivé en Belgique en 2016. J’ai d’abord suivi des cours de néerlandais pendant trois mois, puis j’ai déménagé en Wallonie. J’ai commencé à étudier le français dans le centre d’accueil pendant 5-6 mois, avant de m’inscrire à l’APD. Grâce au français, tout a changé pour moi ! Je n’avais jamais écrit avant, je ne savais même pas écrire mon prénom… Avant, j’avais toujours besoin d’un traducteur mais aujourd’hui, je me fais comprendre, et je comprends beaucoup plus les gens. Maintenant, je peux comprendre le courrier que je reçois, les rendez-vous aussi. En plus, je peux écrire des SMS ou des mails à mes amis, je me sens moins isolé, alors que je vis seul… J’attends la rentrée avec impatience parce que je suis inscrit à une formation en français et en informatique, et j’espère que je pourrai trouver du travail le plus vite possible.

Kaylash, 17 ans

Ici à la maison d’accueil, j’apprends beaucoup de choses sur la Belgique et ce qu’il faut savoir pour pouvoir vivre seul. J’ai beaucoup aimé l’activité que mes éducateurs ont organisée avec une assistante sociale du CPAS car je commence à comprendre comment les services fonctionnent. Avant, je n’avais aucune idée de ce système. J’ai également appris l’importance d’avoir une mutuelle. Les éducateurs m’apprennent à remplir des documents administratifs. Ce n’était pas facile la première fois car il y avait beaucoup de choses à remplir mais avec leur aide, je pourrai me débrouiller quand je vivrai seul.

Shirzad, 17 ans

Ce qui me plaît ici à la maison d’accueil, c’est que je peux enfin cuisiner. Quand j’étais en Afghanistan, je faisais la cuisine avec ma maman et aujourd’hui j’essaie de reproduire ce qu’elle préparait. Dans mon ancien centre, je ne pouvais pas cuisiner, tout était déjà préparé et je n’aimais pas toujours ce qu’on nous proposait. Aujourd’hui, je peux faire mes plats moi-même et je peux faire découvrir ma cuisine à d’autres jeunes mais aux éducateurs aussi.

Amed, 17 ans

Depuis que je suis arrivé à la maison d’accueil, je me sens beaucoup plus calme, moins énervé que dans mon ancien centre. La vie en communauté n’était pas toujours facile, il y a parfois des disputes car on est tous différents. Dans les grands centres, on n’est jamais seul, même quand on a besoin de repos. Ici, je peux me détendre et être au repos quand j’en ai besoin. Je me sens très bien à la maison d’accueil et je peux continuer ma scolarité avec l’aide des éducateurs et des bénévoles.