Hasan, 25 ans – Syrie
En Syrie, j’étudiais l’économie à l’université. J’étais un bon étudiant, mais je redoutais de voir le moment de l’obtention de mon diplôme arriver… Tant que j’étais en cours de master, j’étais dispensé de l’obligation militaire et donc de l’enrôlement dans les troupes de Bachar al-Assad, dont je ne partageais en rien les idées politiques. En dernière année, j’ai même volontairement raté certains examens pour gagner un peu de temps et pour pouvoir organiser mon départ… Après mon arrivée en Belgique, j’ai appris le français à l’APD pendant un an et comme je ne pouvais pas obtenir d’équivalence de diplôme, j’ai repris un bachelier en comptabilité dans une Haute École à Liège. Ce n’est pas facile de poursuivre des études dans une langue qui n’est pas ta langue maternelle. Cela m’a demandé énormément de travail, mais je vais entrer en deuxième année et j’en suis très heureux.
Zahra, 33 ans – Somalie
Quand j’étais petite, je ne pouvais pas aller à l’école, je devais rester à la maison pour aider ma maman. Mes frères et sœurs allaient à l’école coranique, mais moi pas. À 26 ans, j’ai quitté mon pays parce que c’était trop dangereux de rester, il y avait beaucoup de violence. Je suis d’abord allée au Kenya. Je suis restée là pendant deux ans. Puis, je suis partie en Belgique en 2013. J’ai d’abord appris un peu le français dans la bibliothèque de mon quartier, puis j’ai commencé des vrais cours à l’APD avec Yves. C’était magnifique !
Depuis que je parle français, je peux discuter avec l’institutrice de mon fils Ismaïl. Je vais seule chez le docteur, au magasin, au CPAS, à la banque… Le soir, on discute un peu en français avec mon fils. Pour lire aussi, c’est bien : j’aide mon fils pour ses devoirs, j’aide des amies qui ne savent pas lire. La semaine passée, j’ai vu une erreur sur ma souche du magasin : je suis retournée au magasin et on m’a rendu l’argent. Avant, j’aurais payé trop ! Et puis, je peux lire les horaires des bus, et à la gare aussi. Je ne me perds plus en ville : je sais lire le nom des rues. La vie a changé pour moi, je ne suis plus obligée de rester chez moi toute la journée, je sors. Pour écrire, c’est encore difficile, mais je vais continuer à aller à l’école.
Shirin et Ahmad, 32 et 34 ans – Syrie
Mon mari et moi, nous nous sommes rencontrés à l’université. Nous sommes Kurdes et nous avons toujours été habitués à une certaine discrimination. Ce n’était pas agréable mais ce n’était pas toujours négatif. Comme étudiants, par exemple, cela nous poussait à être les meilleurs pour pouvoir réussir ; cela nous donnait de la force de caractère aussi, mais avec le conflit en Syrie, la situation de notre communauté est devenue intenable, nous avions deux enfants en bas âge et nous devions les mettre en sécurité. Le frère de mon mari et sa famille étaient déjà établis en Belgique, il avait étudié le français à l’APD et ouvert un commerce. Nous avons décidé de le rejoindre. Nous aussi, nous avons appris le français à l’APD. Aujourd’hui, mon mari travaille avec son frère, mais il pense reprendre des cours du soir pour pouvoir enseigner l’anglais. Nos enfants vont à l’école, ils ont des amis. Peu à peu, ils oublient la peur…
Ali, 35 ans – Soudan
Dans mon village au Soudan, il n’y avait pas d’école. La plus proche était à 30 km de chez moi. En plus, je devais travailler : garder les troupeaux de moutons et de vaches, m’occuper de nos plantations. Donc, je ne suis jamais allé à l’école, comme aucun de mes frères et sœurs… J’ai quitté mon pays en 2014, j’avais 31 ans. Je suis arrivé en Belgique en 2016. J’ai d’abord suivi des cours de néerlandais pendant trois mois, puis j’ai déménagé en Wallonie. J’ai commencé à étudier le français dans le centre d’accueil pendant 5-6 mois, avant de m’inscrire à l’APD. Grâce au français, tout a changé pour moi ! Je n’avais jamais écrit avant, je ne savais même pas écrire mon prénom… Avant, j’avais toujours besoin d’un traducteur mais aujourd’hui, je me fais comprendre, et je comprends beaucoup plus les gens. Maintenant, je peux comprendre le courrier que je reçois, les rendez-vous aussi. En plus, je peux écrire des SMS ou des mails à mes amis, je me sens moins isolé, alors que je vis seul… J’attends la rentrée avec impatience parce que je suis inscrit à une formation en français et en informatique, et j’espère que je pourrai trouver du travail le plus vite possible.
Kaylash, 17 ans
Ici à la maison d’accueil, j’apprends beaucoup de choses sur la Belgique et ce qu’il faut savoir pour pouvoir vivre seul. J’ai beaucoup aimé l’activité que mes éducateurs ont organisée avec une assistante sociale du CPAS car je commence à comprendre comment les services fonctionnent. Avant, je n’avais aucune idée de ce système. J’ai également appris l’importance d’avoir une mutuelle. Les éducateurs m’apprennent à remplir des documents administratifs. Ce n’était pas facile la première fois car il y avait beaucoup de choses à remplir mais avec leur aide, je pourrai me débrouiller quand je vivrai seul.
Shirzad, 17 ans
Ce qui me plaît ici à la maison d’accueil, c’est que je peux enfin cuisiner. Quand j’étais en Afghanistan, je faisais la cuisine avec ma maman et aujourd’hui j’essaie de reproduire ce qu’elle préparait. Dans mon ancien centre, je ne pouvais pas cuisiner, tout était déjà préparé et je n’aimais pas toujours ce qu’on nous proposait. Aujourd’hui, je peux faire mes plats moi-même et je peux faire découvrir ma cuisine à d’autres jeunes mais aux éducateurs aussi.
Amed, 17 ans
Depuis que je suis arrivé à la maison d’accueil, je me sens beaucoup plus calme, moins énervé que dans mon ancien centre. La vie en communauté n’était pas toujours facile, il y a parfois des disputes car on est tous différents. Dans les grands centres, on n’est jamais seul, même quand on a besoin de repos. Ici, je peux me détendre et être au repos quand j’en ai besoin. Je me sens très bien à la maison d’accueil et je peux continuer ma scolarité avec l’aide des éducateurs et des bénévoles.